Le Barbu
Le barbu est un jeu sur l’origine duquel on sait très peu de chose. C’est un jeu de création et de diffusion récentes, sans doute apparu pour la première fois au début du siècle. Ses règles, très variables d’une région à l’autre, ont été codifiées par les joueurs de Bridge, qui se sont intéressés à ce jeu. Ce dernier est d’une grande difficulté malgré un apprentissage aisé des règles.
MATÉRIEL
Un jeu de 52 cartes.
BUT DU JEU
Répondre aux exigences de sept contrats, qui ont tous un objectif différent.
RÈGLES (4 joueurs)
Ordre des cartes
C’est l’ordre habituel du jeu, de l’As au 2.
Distribution des cartes
Le donneur, qui demeure le même durant les sept coups constituant une manche, distribue une à une treize cartes à chaque joueur dans le sens des aiguilles d’une montre.
Déroulement de la partie
Une partie de barbu se joue en quatre manches, chaque joueur étant successi-vement donneur sur une manche. Chaque manche est composée de sept coups différents, obéissant à des règles et des objectifs propres. L’ordre dans lequel ces coups, ou « choix », se jouent dépend de la volonté du donneur, ou « Déclarant», qui prend ses décisions au vu de sa propre main.
Le barbu fait partie de ces jeux « d’évite » où l’objectif est de ne pas prendre de cartes pénalisantes. Il y a en fait cinq choix « négatifs » de ce type (donnant lieu à l’attribution de points négatifs), où il faut éviter de ramasser certaines cartes, et deux choix « positifs » (donnant lieu à l’attribution de points positifs), où l’on tend vers un but plus constructif. Certaines règles de jeu de la carte s’appliquent néanmoins quel que soit le choix.
– Sur chaque choix, c’est le Déclarant qui entame, c’est-à-dire qui joue la première carte de la donne.
– Les joueurs sont tenus de fournir la couleur demandée par le joueur qui attaque la levée.
– Le joueur qui joue la plus forte carte de la couleur demandée remporte la levée et attaque la levée suivante.
– Le joueur qui n’a pas de carte de la couleur demandée en main peut se dé-fausser, c’est-à-dire se débarrasser d’une carte de la couleur de son choix.
Le Déclarant annonce sur chaque donne son choix, et entame. Le coup se déroule alors selon les règles que nous venons de décrire, en tenant toutefois compte d’éventuelles contraintes supplémentaires, différentes selon le choix effectué.
Les cinq choix négatifs
• Le barbu, qui donne son nom au jeu. C’est le Rf. Il faut éviter de le ramasser lorsqu’on remporte une levée, sous peine d’une pénalité de 20 points. Il est in¬terdit de jouer Cœur tant que l’on possède encore des cartes d’une autre couleur. Il est en revanche permis de se défausser du Cœur si quelqu’un joue une couleur où on n’a pas de carte, et bien sûr obligatoire de fournir du Cœur si quel-qu’un d’autre joue de cette couleur.
• Les Cœurs : il faut éviter de prendre des Cœurs dans ses levées, sous peine d’une pénalité de 2 points par Cœur et de 6 points pour l’As V. Il est là en¬core interdit de jouer Cœur tant que l’on possède des cartes d’une autre couleur.
• Les Dames : il faut éviter de ramasser des Dames dans ses levées, sous peine d’une pénalité de 6 points par Dame.
• Les Levées : il faut éviter de faire des levées, sous peine d’une pénalité de 2 points par levée.
• Les Deux der : il ne faut réaliser ni l’avant-dernière levée, pénalisée de 10 points, ni la dernière levée, pénalisée de 20 points.
Les choix positifs
• L’Atout : il faut réaliser le plus de levées possible, le coup se jouant avec une couleur choisie comme Atout par le Déclarant. L’Atout a préséance sur les autres couleurs : en cas de coupe, c’est le joueur qui a coupé ou celui qui a fourni le plus fort Atout, s’il y a eu surcoupe, qui remporte la levée. Lorsqu’un joueur n’a pas de carte dans la couleur demandée par le joueur qui attaque la levée, il est tenu de couper, et de surcouper si l’on a coupé devant lui. Chaque levée réalisée rapporte 5 points.
• La Réussite : il faut se débarrasser de ses cartes le plus rapidement possible, en reconstituant dans l’ordre les quatre cou-leurs du jeu. A partir d’une carte d’une certaine hauteur (un 9, par exemple), les joueurs doivent compléter chaque famille par la carte immédiatement supérieure ou inférieure.
La hauteur de la réussite, c’est-à-dire la carte initiale à partir de laquelle il est possible de compléter le jeu, est fixée par le Déclarant (toujours dans notre exemple, cette hauteur est le 9. On dit que « la réussite est au 9 »).
Il est interdit de passer si l’on peut poser une carte, et l’on ne peut poser qu’une carte à la fois. Dans le cas où l’on peut poser plusieurs cartes, on pose celle de son choix.
Le joueur qui se débarrasse le premier de toutes ses cartes marque 45 points, le deuxième 20 points, le troisième 10 points et le dernier se voit infliger une pénalité de 10 points.
Fin du coup
Le coup se termine lorsque les joueurs n’ont plus de cartes en main. Chaque joueur compte alors ses points, selon la nature du combat choisi par le déclarant.
La marque
La compensation entre les contres et les surcontres intervient après le compte des points.
En pratique, on opère de la façon sui¬vante : supposons qu’aux levées (contrat choisi par A, le Déclarant, et qui consiste, rappelons-le, à effectuer le moins de le¬vées possible), B passe, C contre le Décla¬rant et D contre A, B et C. A réalise 5 levées, B 4 levées, C 3 levées et D I levée. Le calcul s’effectue ainsi :
• A perd ses 5 levées, plus 2 levées sur C (5-3), plus 4 levées sur D (5-1) =
I I levées, soit -22 points.
• B perd ses 4 levées, plus 3 levées sur D = 7 levées, soit -14 points.
• C perd ses 3 levées, gagne 2 levées sur A et perd 2 levées sur D = 3 levées, soit -6 points.
• D perd sa levée, mais gagne 4 levées sur A, 3 levées sur B et 2 levées sur C = 8 levées, soit +16 points.
Le total des joueurs doit être égal au total théorique du contrat (pour les le-vées -2 points de pénalité x 13 levées = -26 points). Vérifions : A+B+C+D= (-22) + (-14) + (-6) + (+16) = -26 points.
Il n’y a pas eu d’erreur de marque.
La marque s’effectue sur un tableau à double entrée où figurent en ordonnée les différents choix possibles et en abscisse les noms des joueurs. Il faut un tableau par manche. Chaque joueur tient sa propre marque où il inscrit les points et note les contres, pour ne pas les oublier, par une croix dans la case correspondante.
S’il n’y avait qu’une marque, les joueurs seraient sans cesse obligés de déranger le marqueur pour lui demander s’ils ont bien effectué leurs contres obligatoires, quels choix le Déclarant doit encore faire, etc. L’exemple que nous venons de décrire se noterait de la façon suivante, à la ligne « Levées » :
Voici comment se présente une feuille de marque complète après tous les choix. On notera que les totaux des joueurs, sur chaque donne, doivent être égaux au total théorique du contrat, par exemple -20 pour le barbu, (-6) x 4 = -24 pour les Dames, etc. Nous avons marqué ce total théorique entre parenthèses sur le tableau. On note également que les coups positifs et les coups négatifs s’annulent sur l’ensemble des sept choix.
Fin de la partie
La partie se termine lorsque chaque joueur a effectué ses sept choix, c’est-à- dire après quatre manches. Les joueurs font alors leur total général, calculent leurs gains ou leurs pertes en fonction des différences de leurs scores.
STRATÉGIE
Le barbu est un jeu excessivement difficile, chaque type de contrat relevant d’une stratégie différente et tout coup pouvant être considéré comme un cas particulier, en fonction des cartes précédemment jouées et des situations de contre et de surcontre (un joueur qui est contré au barbu, par exemple, fera tout pour que le joueur qui l’a contré ramasse le R V, parce qu’il gagnerait alors 20 points. Sa façon de jouer serait complètement différente si personne ne l’avait contré).
On peut cependant remarquer que l’ordredans lequel ces contrats sont choisis n’est pas indifférent : il existe en effet des choix, comme le barbu ou les Deux der, plus « chers » que d’autres et dont il vaut mieux se débarrasser en priorité avant de se trouver obligé de les choisir avec des mains peu favorables. Avec une mauvaise main, il est en effet probable de ramasser le barbu ou les Deux der, et de se voir contré avec délices par les trois autres joueurs ! Il est en revanche peu fréquent de ramasser l’intégralité des treize levées, quelle que soit sa main.
L’ordre conseillé pour les choix est le suivant, dans la mesure du possible : le barbu, les Deux der, les Cœurs, les Dames, les Levées, l’Atout et la Réussite. Il vaut mieux conserver ses choix positifs pour la fin, car le fait de pouvoir choisir la couleur d’Atout et la hauteur de la réussite constitue un avantage tel que l’on est le plus souvent à l’abri du contre, même avec une main médiocre.
Il faut également signaler que la place que l’on occupe par rapport au Déclarant n’est pas non plus indifférente. Le pre¬mier à parler ne peut contrer les autres joueurs qu’avec une très belle main, car il ne dispose d’aucune information lui permettant de savoir qui a un bon jeu. En revanche, le dernier à parler peut facilement tirer profit des enchères précédentes, comme l’indiquent ces deux exemples :
Il est très facile d’expliquer les enchères des diagrammes ci-dessus sans même connaître les mains des joueurs. A effectuant librement son choix, on suppose qu’il a une belle main. Dans le diagramme I, B passe : il asans doute une main moyenneou mauvaise. C, sachant cela, ne contre pas B : c’est sans doute qu’il a lui-même une mauvaise main. D le contre donc les yeux fermés dès qu’il possède une main honorable.
Dans le diagramme 2, B passe à nouveau et C le contre. Si D a une main correcte et que A et C ont, d’après les enchères, une belle main, c’est que la main de B est horrible. D peut donc le contrer en toute sécurité.