Le Tarot
Le tarot est l’ancêtre des cartes à jouer. Introduit en Italie par les Sarrasins au x* siècle, son nom dérive de l’italien tarroco, « tour », mais son origine plus lointaine demeure toujours inconnue : ce jeu se référerait, selon certains, à la Tora (loi juive), et, selon d’autres, à la Rota (Roue de la Fortune).
Il a longtemps été associé aux mystères de la divination, les cartomanciennes utilisant les différents symboles représentés sur les Atouts pour prédire l’avenir : I. le Bateleur ; 2. la Papesse ; 3. l’impéra-trice ; 4. PEmpereur ; S. le Pape ; 6. l’Amoureux ; 7. le Chariot ; 8. la Justice ; 9. PErmite ; 10. la Roue de la Fortune ; 11. la Force ; 12. le Pendu ; 13. la Mort ; 14. la Tempérance ; 15. le Diable ; 16. la Foudre ; 17. l’Étoile; 18. la Lune; 19. le Soleil; 20. le Jugement; 21. le Monde. L’Excuse, quant à elle, représente un Fou.
Le tarot s’est toutefois séparé des diseuses de bonne aventure à l’époque de la Renaissance, pour devenir un jeu de cartes à part entière.
MATÉRIEL
Un jeu de 78 cartes, spécifique au tarot, comportant d’une part 21 Atouts et I Excuse, d’autre part 4 couleurs (Pique, Cœur, Carreau, Trèfle) de quatorze cartes chacune, représentant les cartes d’un jeu classique auxquel¬les viennent s’ajouter un Cavalier.
BUT DU JEU
Remplir un contrat en réalisant le maximum de points par des levées.
RÈGLES (3 ou 4 joueurs)
Ordre et valeur des cartes
L’ordre des cartes dans chaque couleur est le suivant, par force décroissante : Roi, Dame, Cavalier, Valet, 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, As. Le Roi est donc la plus forte et l’As la plus faible.
A l’Atout, la force des cartes décroît du 21 au I, que l’on nomme le Petit. L’Ex-cuse, enfin, n’a pas de valeur propre ; elle permet, en «s’excusant», d’éviter d’avoir à fournir à la couleur ou à l’Atout et reste la propriété de son camp (sauf si elle est jouée à la dernière levée). Les Atouts ont toujours préséance sur les couleurs. L’Excuse, le 21 et le Petit sont appelés « Oudlers » ou « Bouts ».
En ce qui concerne la valeur des cartes dans le compte des points, le jeu contient 91 points, qui se répartissent ainsi :
• Les 3 Oudlers (21, Petit, Excuse) + une petite carte ou un Atout, chacun 5 pointsx3 = 15 points.
• Les Rois + une petite carte ou un Atout, chacun 5 pointsx4=20 points.
• Les Dames + une petite carte ou un Atout, chacun 4 pointsx4= 16 points.
• Les Cavaliers + une petite carte ou un Atout, chacun 3 pointsx4=l2 points.
• Les Valets + une petite carte ou un Atout, chacun 2 pointsx4=8 points.
• Les 40 « cartes blanches » restantes, par Paire I pointx20=20 points.
Total du jeu 91 points.
Distribution des cartes
Le donneur distribue dans le sens inverse des aiguilles d’une montre toutes les cartes (trois par trois si l’on joue à 4 joueurs, et quatre par quatre si l’on joue à 3 joueurs) en constituant à son gré, mais carte par carte, un talon de six cartes appelé le « Chien ». Il donne ainsi dix-huit cartes à chacun en cas de jeu à 4, et vingt-quatre cartes à chacun en cas de jeu à 3.
Déroulement de la partie
Le jeu se subdivise en deux phases distinctes : les Enchères et le Jeu de la carte. La donne est toutefois annulée si l’un des joueurs possède le Petit sec, c’est-à-dire le I d’Atout non accompagné par au moins un autre Atout. Il doit alors obligatoirement l’annoncer avant les Enchères.
Les Enchères
Chaque joueur, en commençant par celui placé à la droite du donneur, parle à tour de rôle et choisit entre passer et quatre Enchères, qui sont par ordre croissant : la Prise (ou Petite), la Garde, la Garde sans le Chien et la Garde contre le Chien. Les Enchères ne se différencient que lors de la marque, par des coefficients de rétribution (et de pénalité en cas de chute) de plus en plus élevés, et, pour les deux derniers contrats, par une plus grande difficulté dans le Jeu de la carte.
Le « preneur », auteur de la plus forte Enchère, s’engage, face aux autres joueurs ligués contre lui en défense, à réaliser un nombre minimal de points grâce aux levées qu’il fera. Ce minimum dépend du nombre d’Oudlers détenus par le pre¬neur à la fin du coup.
• Sans Oudler, il faut réaliser 56 points.
• Avec I Oudler, il faut réaliser 51 points.
• Avec 2 Oudlers, il faut réaliser 41 points.
• Avec 3 Oudlers, il faut réaliser 36 points.
Comme il n’y a qu’un tour d’Enchères, en cas de passe général, la donne tourne dans le sens du jeu.
Le Jeu de la carte
Lors de cette deuxième phase, le preneur va tenter de réaliser son pari :
– En cas de Prise ou de Garde, le preneur bénéficie d’un avantage considérable : il peut recomposer sa main en y incorporant les cartes du Chien (le talon), après avoir montré ce dernier aux défenseurs, puis en éliminant, faces cachées, six cartes de son choix. S’il est possible d’écarter les cartes trouvées au Chien, il est en revanche interdit d’y inclure des Rois, des Atouts ou des Oudlers. L’écart reste la propriété du preneur, qui en comptabilisera la valeur avec ses propres points, à la fin de la donne.
– En cas de Garde sans le Chien, le preneur ne peut utiliser le Chien pour modifier sa main. Celui-ci reste caché, et sa composition reste donc inconnue du preneur comme des défenseurs jusqu’à la fin de la donne. Le Chien demeure cependant la propriété du preneur.
– En cas de Garde contre le Chien, non seulement le preneur ne peut utiliser le Chien, mais de plus la propriété de ce dernier est transférée à la défense.
Une fois l’écart réalisé, le joueur placé à la droite du donneur entame. Avant de jouer sa première carte, tout joueur possédant 10, 13, 15 ou 18 Atouts peut les annoncer. A cette annonce correspond une prime .
Dans le Jeu de la carte, les joueurs sont soumis à plusieurs obligations. Il est né-cessaire de jouer la couleur demandée par le partenaire qui attaque la levée. Si on ne possède pas de cartes de la couleur de-mandée, et dans ce cas seulement, il faut couper, surcouper si quelqu’un a coupé avant, et à défaut sous-couper. A l’Atout, on est obligé de forcer, c’est-à-dire de monter si possible sur la plus forte carte précédemment fournie. Il n’est donc permis de jouer une autre couleur que lorsque l’on ne possède ni carte dans la couleur demandée ni Atout.
Le joueur quia fourni la plus forte carte de la couleur demandée gagne la levée, à moins qu’il n’ait été coupé. C’est alors le joueur qui a coupé (ou qui a fourni le plus gros Atout en cas de coupes multiples) qui remporte la levée. Le gagnant de la levée attaque la nouvelle levée. Si la première carte d’une levée est l’Excuse, la carte suivante définit la couleur demandée.
Fin du tour
Lorsque les joueurs n’ont plus de cartes en main, chaque camp compte les points contenus dans les levées qu’il a effectuées. La défense met toutes ses levées en commun, tandis que le Chien revient soit à la défense, soit au preneur, selon le contrat demandé. Si le preneur a réalisé autant ou plus de points que ne l’exigeait son contrat (voir exemples de mains, page précédente), on dit qu’il a« passé », en cas d’échec, on dit qu’il a chuté.
Marque et décompte des points
La marque fait intervenir deux éléments, les points dus à la réussite du contrat ou à sa chute, et les points d’annonce.
Tout contrat réussi est arbitrairement comptabilisé pour 25 points, auxquels on rajoute les points de gain ou de perte, c’est-à-dire les points supplémentaires ou manquants par rapport au nombre minimal de points à réaliser. Ce total est assorti d’un coefficient multiplicateur, différent selon l’enchère effectuée.
– Pour la Prise, coefficient I, donc un total identique ;
– pour la Garde, coefficient 2, soit les points de la Prise x 2 ;
– pour la « Garde sans », coefficient 4, soit les points de la Prisex4 ;
– pour la « Garde contre », coefficient 6, soit les points de la Prise x 6.
Si le preneur passe, chaque défenseur lui paye ce total. S’il chute, il paye ce total à chaque défenseur. La marque s’effectue sur une feuille, séparée en autant de colonnes qu’il y a de joueurs.
Les points d’annonce sont des primes, rétribuant trois possibilités :
– La Poignée : un joueur possédant au moins dix Atouts peut, s’il le désire, l’annoncer et la montrer avant de jouer sa première carte. L’Excuse peut en faire partie à condition de ne pas avoir un onzième Atout dans son jeu. A cette Poignée correspond une prime fixe, c’est-à-dire -non multipliable selon l’enchère (voir page suivante).
- La Simple Poignée (13 Atouts pour 3 joueurs, 10 à 4 joueurs) vaut 20 points.
- La Double Poignée (15 Atouts pour 3 joueurs, 13 à 4 joueurs) vaut 30 points.
- La Triple Poignée (18 Atouts pour 3 joueurs, 15 à 4 joueurs) vaut 40 points.
Cette prime revient au camp vainqueur de la donne : si le preneur passe, il encaisse la prime de chaque défenseur, s’il chute, il paye la prime à chaque défenseur.
– Le Petit au bout : si le Petit est joué lors de la dernière levée, on dit qu’il est « mené au bout ». Il donne droit à une prime de 10 points, multipliable selon le contrat demandé. Cette prime ne va pas au gagnant de la donne, mais au joueur qui a réalisé le dernier pli avec le Petit. Elle augmente ou réduit ainsi les gains du camp vainqueur de la donne. Attention, le Petit peut être capturé par un plus fort Atout lors de la dernière levée.
– Il existe enfin un cas rarissime d’octroi de prime : le Chelem. Il y a Chelem quand un camp remporte toutes les levées. Le Chelem donne droit :
- S’il est annoncé et réalisé, à 400 points supplémentaires.
- S’il est non annoncé mais réalisé, à 200 points supplémentaires.
Si le Chelem est annoncé mais non réalisé, le preneur est pénalisé de 200 points. En cas d’annonce de Chelem, c’est le preneur qui commence la partie. Il peut, à titre exceptionnel, jouer l’Ex- cuse en dernier, et le Petit sera considéré comme mené au bout s’il est joué à l’avant-dernière levée. Si le preneur subit un Chelem par la défense, il paye 200 points supplémentaires à chaque défenseur.
La marque est le reflet des événements qui se sont déroulés tout au long de la donne : réussite ou chute du contrat, prise en compte éventuelle d’annonces liées à ce résultat (Poignée) ou d’annonces indépendantes (Petit au bout).
Il est utile de noter que le score du preneur correspond au score de la donne multiplié par le nombre de défenseurs, et d’autre part que l’addition des scores du preneur et des défenseurs doit être égale à zéro.
LES ANNONCES ET LA MARQUE
Reprenons l’exemple précédent, où A passait sa Garde contre de 2 points. Imaginons qu’il ait annoncé Poignée et Petit au bout. Il encaisse maintenant de chaque joueur :
25 points (points de contrat)+2 points (points de passe) + 10 points (Petit au bout) = 37 points, multipliés par 6 = 222 points, + 20 points (Poignée) = 242 points.
Les 10 points du Petit au bout ont été multipliés, tandis que les 20 points de la Poignée, «non multipl iables », n’ont été rajoutés au total qu’à la fin.
Fin de la partie
Une partie n’a pas de limites précises et s’achève par consentement mutuel. On fixe habituellement en début de partie l’heure d’arrêt de la partie, ou l’on prévient en cours de jeu que l’on ne jouera plus que 3 ou 5 tours, par exemple.