Les échecs
Les Échecs sont nés en Inde, il y a I 000 ou 2000 ans, sous le nom de Shaturanga. Ils se sont propagés au Moyen-Orient par la route des caravanes (Perse, Irak, Syrie, Egypte), sous le nom de Shatranj, pour finalement être introduits en Europe par les croisés, et largement diffusés par les conquêtes arabes. Les Échecs peuvent à la fois être considérés comme un jeu, très populaire dans le monde entier, mais aussi, à haut niveau de compétition, comme un sport et un art : en effet, si les parties sont très éprouvantes nerveusement, elles permettent aux joueurs d’exprimer leurs idées et leur personnalité dans une création chaque fois unique et renouvelée.
MATÉRIEL
Un échiquier de 8 cases de côté et un jeu d’Échecs composé de 32 pièces, 16 blanches et 16 noires, décrites plus loin.
BUT DU JEU
Capturer le Roi adverse. En pratique, cette capture n’est cependant jamais effectuée : lorsqu’elle est inévitable, on se contente de déclarer le Roi « échec et mat », expression provenant du persan Shah mat et signifiant « le roi est mort ».
RÈGLES
L’échiquier et les pièces
L’échiquier est un plateau composé de 64 cases alternativement blanches et noires. Par convention, au début du jeu, les joueurs placent l’échiquier de façon à avoir une case blanche à leur droite. On donne le nom de « colonnes » aux séries de cases verticales, celui de « rangées » ou « traverses » aux séries de cases horizontales, et de « diagonales » aux séries de cases obliques, comme l’illustre le diagramme 1.
L’échiquier comporte un système simple de coordonnées, permettant de désigner chaque case. Ce système est semblable à celui de la Bataille navale, que tout le monde connaît : on attribue à chaque colonne une lettre, de a à h, et à chaque rangée un chiffre, de I à 8. Chaque case est ainsi identifiée par la lettre et le chiffre correspondant à l’intersection d’une colonne et d’une rangée : par exemple, la case située colonne « c » sur la quatrième rangée porte le nom de « case c4 »
La position de départ est représentée sur le diagramme 2. Les pièces sont disposées de façon symétrique dans les deux camps. On notera que la Dame de chaque joueur se trouve sur une case de la couleur de son propre camp (c’est-à-dire une case blanche pour la Dame blanche et une case noire pour la Dame noire).
Marche et prise des pièces
Nous allons décrire la marche des pièces sur un échiquier vide. Dans la pratique, les pièces rencontrent des obstacles et obéissent alors aux règles suivantes :
• Aucune pièce ne peut se rendre sur une case occupée par une pièce amie.
• Une pièce peut en revanche se rendre sur une case occupée par une pièce ennemie. Cette dernière est alors ôtée du jeu : on dit qu’elle a été « prise ».
• Aucune pièce ne peut sauter au-dessus d’une pièce amie ou ennemie (sauf le Cavalier).
• Toutes les pièces prennent comme elles marchent (sauf le pion).
Voici la marche de chaque pièce :
– La Tour :
Elle se déplace en ligne droite, horizontalement ou verticalement, d’autant de cases qu’elle le désire (diagramme 3).
– Le Fou :
Il se déplace diagonalement, d’autant de cases qu’il le désire. Notons qu’un Fou demeure toute la partie sur sa couleur d’origine (diagramme 4).
– La Dame :
Cette pièce, la plus puissante du jeu, réunit la marche de la Tour et du Fou ; elle peut se déplacer dans toutes les directions d’autant de cases qu’elle le désire (diagramme 5).
– Le Roi :
Il se déplace comme la Dame dans toutes les directions, mais d’une seule case à la fois. De plus, il n’a pas le droit de se mettre lui-même en échec (c’est-à-dire de se rendre sur une case où il serait susceptible d’être capturé par l’adversaire). Ainsi, deux Rois ne peuvent jamais se trouver en contact (diagramme 6).
– Le Cavalier :
Il a une marche très particulière, effectuant un pas de Tour et un pas de Fou, et peut franchir des obstacles. Notons qu’il aboutit toujours sur une case d’une couleur différente de sa case de départ(diagramme 7).
– Le Pion :
Il marche en avant, mais prend en biais. Il progresse d’une case à la fois seulement, soit verticalement (cas général) soit diagonalement (quand il capture une pièce ennemie). Toutefois, le pion peut avancer de deux cases lorsqu’il se trouve encore situé sur sa case d’origine. Le pion est la seule pièce à ne jamais pouvoir reculer (diagramme 8et 9).
Coups particuliers
Les trois coups suivants obéissent à des règles spéciales :
– La Prise en passant :
Si un pion sur sa case initiale avance de deux cases mais aurait pu être capturé par un pion adverse s’il n’avait avancé que d’une case, la prise est possible comme si le pion n’avait avancé que d’une case. Toutefois, cette prise doit être effectuée immédiatement pour être valable (diagramme 10).
- Diagramme 10 : La prise en passant
– La Promotion :
Tout pion qui parvient sur sa dernière rangée doit être immédiatement remplacé par une autre pièce de sa couleur (Roi excepté), au gré du joueur. Si l’on choisit généralement une Dame, il est possible, quand la position l’exige, d’effectuer une promotion en Tour, en Fou ou en Cavalier.
– Le Roque :
Le Roi jouit, une fois par partie, de la faculté de se réfugier sur l’une ou l’autre aile : il se déplace horizontalement de deux cases vers l’une des deux Tours, tandis que celle-ci saute au-dessus de lui pour venir se placer à son côté. On distingue le Petit Roque et le Grand Roque, selon le parcours effectué par la Tour (diagramme 11).
Cette manœuvre simultanée de deux pièces constitue un seul coup, qui ne peut être effectué que si les quatre conditions suivantes sont remplies :
1. Le Roi et la Tour du Roque ne doivent pas avoir été déplacés.
2. Les cases situées entre le Roi et la Tour du Roque doivent être vides.
3. Le Roi ne doit pas être en échec.
3. Le Roi ne doit pas passer par une case où il serait en échec, c’est-à-dire que les deux cases qu’il traverse ne doivent pas être attaquées par une pièce adverse.
Situations spéciales
– L’Échec et Mat :
Rappelons qu’un Roi attaqué est dit «en échec». Comme il n’est pas permis de mettre ou de laisser son Roi en échec, l’attaque doit être parée de façon prioritaire, soit en capturant la pièce attaquante, soit en interposant une pièce entre le Roi et la pièce attaquante, soit en déplaçant le Roi. Quand aucune de ces parades n’est possible, comme dans le diagramme 12 A, on dit que le Roi est « mat » et la partie s’arrête (la prise effective du Roi ne s’effectue jamais).
– Le Pat :
Quand un joueur dont le Roi n’est pas en échec doit jouer mais ne le peut pas, faute de coups légaux à sa disposition, on dit que ce joueur est « pat» : la partie est alors nulle. Sur le diagramme 12 8, les Noirs sont « pat » si c’est leur tour de jouer : ils ne peuvent bouger leur Roi (qui n’a pas le droit de se mettre en échec) et n’ont pas d’autre coup à leur disposition.
Valeur des pièces
L’expérience a permis d’attribuer aux pièces une valeur approximative, fonction de leur mobilité :
Pièces dites « mineures » :
– le pion vaut 1
– le Cavalier vaut 3
– le Fou vaut 3
Pièces dites « lourdes » :
– la Tour vaut 5
– la Dame vaut 10
On notera certaines équivalences :
– 1 Cavalier = 1 Fou = 3 pions.
– 1 Tour = 1 pièce mineure + 2 pions (la différence entre une pièce mineure et une Tour se nomme la « qualité »).
– 2 Tours = 1 Dame = 3 pièces mineures.
Le Roi est une pièce particulière qui, ne pouvant être prise ou échangée, n’est pas susceptible d’être cotée. Il est cependant possible de lui attribuer une valeur défensive et offensive (d’environ 5 unités).
Déroulement de la partie
Chaque joueur joue un coup à tour de rôle, le joueur ayant les Blancs débutant la partie. Le jeu se déroule habituellement en trois grandes phases :
– L’ouverture : phase de développement des forces, par laquelle les armées montent au combat.
– Le milieu de jeu : phase de lutte intense où chaque joueur tente de s’imposer. La stratégie (que faire ?) et la tactique (comment le faire ?) y règnent en maîtres. La technique défensive progressant sans cesse, il est maintenant rare qu’un joueur se fasse « mater» : le plus souvent, une attaque bien menée ne permet que de prendre un avantage matériel.
– La finale : phase dans laquelle on tente de réaliser les avantages acquis en milieu de jeu (par exemple en poussant un pion à Dame). La finale se caractérise par un matériel réduit, à la suite des échanges de pièces qui se sont produits dans le milieu de jeu.
VARIANTES
Les Échecs à qui perd gagne
Variante amusante des Échecs orthodoxes, où la prise est obligatoire et où le but consiste à se faire mater. En cas de prises multiples, un joueur conserve le choix de la prise.
Les Échecs marseillais
Chaque joueur, à tour de rôle, peut jouer deux fois de suite, soit en déplaçant deux pièces différentes, soit en déplaçant la même pièce deux fois consécutives. Les prises sont autorisées, mais une situation spéciale se produit en cas d’échec : comme celui-ci doit être immédiatement paré, le joueur qui fait échec par son premier coup est privé de deuxième coup. Son adversaire doit, quant à lui, parer l’échec par son premier coup. Le Mat met fin à la partie, de façon normale.
Les Échecs écossais
Chaque joueur, à tour de rôle, a le droit d’effectuer un mouvement de plus que son adversaire : ainsi, après que les Blancs ont débuté la partie, les Noirs jouent deux coups de suite, puis les Blancs jouent trois coups consécutifs, les Noirs quatre, etc.
Tout échec devant être immédiatement paré, le joueur qui fait échec lors d’un coup quelconque est privé de ses coups restants, s’il y en a. L’adversaire, comme dans les Échecs marseillais, doit parer l’échec par son premier coup. Le Mat met, tout à fait normalement, fin à la partie.
Les Échecs renforcés
Attribués à L.. Tressan, vers 1840, ils constituent le premier panneau d’un triptyque comprenant Échecs renforcés, Échecs revenants et Échecs fantômes (voir plus loin). Le joueur qui capture une pièce se voit attribuer une pièce équivalente, mais de sa propre couleur, qu’il place immédiatement dans le eu à l’endroit de son choix. Trois conditions doivent toutefois être respectées :
– Une pièce n’a pas le droit d’effectuer une prise en renaissant, et ne peut donc réapparaître que sur une case vide.
– Un pion ne peut renaître sur sa dernière rangée (en effet, bénéficiant aussitôt d’une promotion, il ne renaîtrait pas alors réellement en pion).
– Un Fou doit renaître sur une case de même couleur que la case où il a été capturé, afin de conserver l’équilibre du jeu.
Les Échecs revenants
Imaginés par R.L. Frey en 1947, ils rappellent les Échecs renforcés, avec la différence qu’une pièce capturée, au lieu d’aller grossir les rangs du camp qui vient d’effectuer la prise, est restituée à son détenteur originel.
Celui-ci peut poser la pièce sur la case de son choix, sous réserve d’obéir aux quatre conditions suivantes :
– Une pièce ne peut être posée sur une case où elle menace la pièce qui vient de la capturer.
– Une pièce doit renaître sur une case vide.
– Un Fou doit renaître sur une case de même couleur que la case où il a été capturé.
– Un pion ne peut renaître sur sa première ou sa dernière rangée.
Les Échecs fantômes
Ils appartiennent, nous l’avons dit, à la même famille que les Échecs renforcés et les Échecs revenants. Dans cette forme de jeu, les pièces reviennent à leur détenteur originel, mais uniquement sur les cases où elles ont été capturées, et quand ces dernières sont vides. Elles réapparaissent alors sous la forme de fantômes. Le fantôme se déplace et capture comme une pièce normale, mais ne peut lui-même être pris, même par un fantôme adverse. Si plusieurs pièces sont prises sur la même case, elles réapparaissent, chaque fois que cette case est vide, dans leur ordre de capture.
Les Échecs explosifs
Chaque joueur « mine » au début de la partie deux cases de l’échiquier (et note celles-ci sur un morceau de papier pour vérification ultérieure). Si un joueur place une pièce sur une case minée par l’adversaire, sa pièce « saute », c’est-à-dire disparaît de l’échiquier comme si elle avait été prise. Ce joueur ne peut alors jouer une autre pièce : le droit de jouer passe à son adversaire qui, de plus, peut changer la case minée qui vient de sauter, de façon à disposer toujours de deux cases actives. Le Roi qui passe sur une case minée saute comme les autres pièces et se voit déclaré « mat ».
Les Échecs à deux camps opposés
Ce système de jeu, imaginé vers 1950 par Michelson, permet aux deux joueurs de conduire les pièces blanches comme les pièces noires : une fois le premier coup de la partie effectué par les Blancs, chaque joueur joue deux coups consécutifs, l’un avec les Noirs et l’autre avec les Blancs.
Le premier joueur à mater l’un ou l’autre des deux Rois gagne la partie.
Les Échecs tournants
Les joueurs conviennent en début de partie d’un nombre quelconque (par exemple 5) et changent de camp chaque fois que Blancs et Noirs ont joué ce nombre de coups : ainsi, dans notre exemple, après 5 coups Blancs et 5 coups Noirs, les joueurs échangent leur place, et la partie se poursuit normalement. Les joueurs changeront une nouvelle fois de camp aux 10e, 15e, 20e coups, etc.
Le premier joueur (quel que soit le camp qu’il conduit alors) parvenant à mater l’autre gagne la partie.
Les Échecs à placement
Dans cette variante, élaborée par R. Van Dien en 1941, le jeu commence devant un échiquier vide. Chaque joueur, à tour de rôle, place ses pièces sur ses deux premières rangées, à l’emplacement de son choix : il est par exemple possible de se doter de deux Fous de même couleur. Si, au cours de ce processus, un Roi est mis en échec, il doit s’en protéger immédiatement en interposant une pièce sur sa deuxième rangée ou en s’enfuyant.
Une fois toutes les pièces placées, la partie proprement dite débute, en obéissant aux règles habituelles de déplacement et de prise du jeu orthodoxe, sous réserve des restrictions suivantes :
– Le Roque est supprimé.
– Un pion à sa case de départ ne peut plus avancer que d’une case.